
Quand je demande aux gens qui, selon eux, les aidera lorsqu’ils seront plus âgés, la plupart répondent sans hésitation « mes enfants ». C’est vrai que les enfants adultes sont souvent d’une aide précieuse lorsque leurs parents avancent en âge. Et si ces enfants adultes ne s’entendent pas très bien entre eux, on me répond qu’ils sauront bien faire équipe quand il le faudra, notamment pour contribuer aux soins à leurs parents ou encore pour régler la succession de manière harmonieuse.
De même, les enfants adultes font souvent des suppositions à propos de leurs parents et ont des attentes à leur égard. Par exemple, ils peuvent penser que leurs parents voudront passer le plus de temps possible avec leurs petits-enfants et les garder quand eux-mêmes recommenceront à travailler. Les enfants adultes peuvent aussi croire que leurs parents voudront emménager chez eux quand ils deviendront plus âgés ou, à l’inverse, qu’ils ne voudront jamais quitter la maison familiale.
De nos jours, les enfants adultes peuvent vivre des réalités très diverses : ils peuvent travailler dans d’autres pays et ne pas être présents pour fournir l’aide nécessaire à leurs parents; ils peuvent se retrouver à jongler avec leurs multiples responsabilités — vis-à-vis de leurs propres enfants, leur travail à temps plein et leurs parents —; ou encore, il peut y avoir des conflits parmi les frères et sœurs, qui empêchent les enfants adultes de faire équipe pour aider leurs parents. En outre, les gens sont souvent surpris de constater que leurs enfants ne partagent pas toujours les mêmes valeurs. J’ai souvent entendu des parents ou des enfants adultes dire : « Nous avons grandi dans la même famille, alors pourquoi voyons-nous ce problème si différemment, pourquoi ne parvenons-nous pas à l’aborder de la même façon? »
Les aînés d’aujourd’hui, quant à eux, peuvent avoir une vie active, être occupés à poursuivre leurs propres rêves et savent à quoi ils veulent consacrer leur temps; et cela peut inclure ou non leurs petits-enfants. J’ai entendu des gens dire : « J’aime mes petits-enfants et je chéris le temps que je passe avec eux, mais j’ai déjà élevé une famille; maintenant, je veux avoir la liberté de faire autre chose. » De plus, la plupart des aînés que j’ai rencontrés ont indiqué qu’ils ne voudraient pas déménager chez leurs enfants s’ils avaient besoin de plus d’aide. C’est important d’ajouter que l’image de l’aîné qui refuse de quitter le nid familial est de moins en moins commune. Bon nombre de personnes reconnaissent que la maison dans laquelle elles vivent n’est peut-être pas l’endroit le plus adapté à leur situation et sont ouvertes à d’autres possibilités de lieu de vie.
Comment alors composer avec les suppositions et les attentes qui peuvent miner les relations familiales? La réponse : avoir les conversations essentielles avec les membres de notre famille. Cependant, avant de parler avec qui que ce soit, nous devons réfléchir à ce que nous voulons, à ce que nous sommes prêts ou non à faire et à ce qui compte pour nous.
Ensuite, nous devons avoir des conversations honnêtes et sincères. Si vous êtes le parent, vous pouvez discuter avec les membres de votre famille de ce que vous voulez et de ce que vous espérez de chacun. Puis, demandez-leur si cela est réaliste pour eux. Si vous êtes l’enfant adulte, vous pouvez parler à vos parents de la relation que vous souhaitez avoir avec eux au fur et à mesure qu’ils prendront de l’âge, des façons dont vous pourrez les aider, et de la place que vous aimeriez qu’ils occupent dans votre vie. Encore une fois, vous pouvez leur demander si vos attentes correspondent à la vision qu’ils ont de leur vie. Ces conversations évolueront, puisque les réalités de chacun changeront avec le temps.
Il peut sembler étrange de parler ouvertement de ces questions. Pourtant, les résultats peuvent en être inestimables. Durant mes 30 années et plus de travail auprès des familles, j’ai remarqué que la majorité des problèmes étaient dus à un manque de conversations franches, ainsi qu’à des suppositions et des attentes qui n’ont jamais été vérifiées. Les déceptions et les peines dont j’ai été témoin (beaucoup se sont d’ailleurs répercutées sur plusieurs générations) auraient pu être évitées par de l’introspection et des conversations ouvertes avec les autres membres de la famille.
Souhaitons-nous l’harmonie et une meilleure compréhension intergénérationnelles; et des conversations essentielles qui nous aideront à y parvenir!
La Dre Amy est conseillère certifiée auprès des aînés, vice-présidente de la Fédération internationale du vieillissement et cofondatrice de l’Essential Conversations Project. Travailleuse sociale auprès des aînés, elle œuvre auprès d’eux et de leurs familles depuis plus de 30 ans.